Loi de finances 2023 : les plus-values immobilières dans le viseur du Sénat

L’amendement adopté par le Sénat vendredi soir dernier visant à réformer le régime des plus-values de cessions immobilières cristallise deux visions bien distinctes quant à l’avenir du secteur. Gabriel Attal, ministre délégué aux comptes publics, a déclaré qu’une telle réforme provoquerait un « véritable big bang du marché immobilier ».

Un court rappel du système fiscal actuel :

Les plus-values immobilières taxables (la vente de la résidence principale est exonérée) subissent une taxe au titre de l’impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 19% et de 17,2 % au titre des prélèvements sociaux ; pour un taux global de 36,2 %. Sur cette base intervient un taux d’abattement applicable chaque année, si bien que la part taxable à l’impôt sur le revenu s’annule au bout de 22 ans et les prélèvements sociaux au bout de 30 ans.

Le mécanisme fiscal proposé par l’amendement du sénateur centriste Vincent Delahaye est tout autre : la fiscalité reste élevée et inchangée pour les biens détenus moins de deux ans. En revanche, elle chute sans tenir compte de la durée de détention. Le taux passe ainsi de 36,2% à 15% dont 9% au titre de l’impôt sur le revenu et 6% au titre de la CSG et des prélèvements sociaux.

Deux logiques s’opposent :

« Cela change complètement la logique, avec la fin des abattements pour durée de détention, avec la baisse très importante du taux d’imposition au bout de deux ans de détention seulement, avec la suppression de la taxe sur les plus-values élevées, souligne Gabriel Attal. Il faut le dire, c’est une petite révolution là où nous considérons que le marché immobilier a plutôt besoin de stabilité. » Le ministre n’a pas manqué de préciser que cette évolution serait « une perte de recettes très importante pour les finances publiques ».

De son côté, l’auteur de l’amendement, Vincent Delahaye, a prévu de compenser les pertes fiscales « à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs ». Par ailleurs, il souligne que le régime actuel d’imposition sur les plus-values a été conçu pour lutter contre la spéculation en favorisant les détentions longues mais « ce régime ne semble plus en mesure de répondre à la fois à la crise du logement et à la crise de la construction dont souffre une large partie de la population ».

 Cet amendement permettrait selon lui de « rendre le taux réel d’imposition de droit commun unique et permanent quelle que soit la durée de détention afin de favoriser les cessions des biens détenus depuis peu à l’image des régimes en vigueur dans de nombreux pays européens comme la Suède, le Royaume-Uni ou encore l’Espagne ». Enfin, afin de ne pas pénaliser les propriétaires ayant fait le choix de la détention longue (et dont la fiscalité pourrait augmenter), le sénateur précise que « les dispositions du présent amendement n’entreraient en vigueur que pour les cessions intervenant à compter du 1er janvier 2024 ». Au vu des enjeux de recettes fiscales et du traitement régulier des propriétaires immobiliers par le gouvernement, il semble néanmoins probable que cet amendement disparaisse par l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution à l’Assemblée nationale.

Source : Le Figaro Immobilier